Bonjour,
Je viens dénoncer ici une violence sexiste d’un nouveau genre, relative à l’indélébilité du viol pour la victime, et de la double peine qui en résulte.
A l’âge de 22 ans, j’ai été victime de séquestration et viol avec pénétration. L’agresseur fut condamné 2 ans plus tard en Cour d’Assises. A la suite de l’agression et jusqu’à la veille du procès, j’ai été suivie par un médecin psychiatre recommandé par la cellule médico-légale, pour un traitement anti-dépresseur et, à la veille de ma confrontation avec mon agresseur au Tribunal, un suivi thérapeutique en clinique (j’avais alors 24 ans).
20 ans plus tard (j’ai aujourd’hui 40 ans), je me retrouve face à mon ex-mari dans un divorce contentieux, qui ne devait avoir pour objet que le partage de notre patrimoine (que je souhaite pour ma part égalitaire).
Afin de rétorsion et déstabilisation, mon ex-mari a volé (dans mon carnet de santé d’enfant ou je les avais soigneusement conservé) les documents relatifs au jugement de viol et suivi psychiatrique, documents par ailleurs strictement personnels et confidentiels. Avec une répugnante perversité, il les jette en pâture dans le cadre de la procédure civile de divorce, en vue de réclamer une garde exclusive de mes enfants (8 et 10 ans), au prétexte que je serais inapte à les élever.
Au-delà de l’étalage obscène des sévices qui me furent infligés, Monsieur – avec la complicité de son avocate – établit, sans aucune autre justification médicale, que je serais « instable psychologiquement », puisqu’internée en clinique a l’âge de 22 ans (8 ans avant la naissance de mon premier enfant) et suivie alors par un psychiatre.
Je précise que je ne lui ai, au cours de notre vie maritale, parlé qu’une seule fois de cet événement dont j’étais parvenue à faire le deuil 20 ans plus tôt, en grande partie grâce au processus judiciaire.
L’argumentaire de Monsieur, savamment orchestré par son avocate, tendrait donc à établir qu’une femme violentée sexuellement à l’âge de 22 ans devrait se voir retirer la garde de ses enfants à l’âge de 40.
Mon audience devant Mme le Juge aux Affaires Familial se tiendra le 1er décembre 2021. Bien que n’ayant aucun doute que le Tribunal ne soit pas dupe de ces manœuvres tant abjectes que grossières, je me vois affairée depuis un mois à justifier à grand renfort de témoignages de proches (démarche au demeurant humiliante dans ce contexte), que je suis une bonne mère, pas « dangereuse » pour mes enfants.
Me voilà donc agressée une nouvelle fois, la violence sexiste ayant remplacé la violence sexuelle. Mon ex-mari défend à ad nauseam la théorie selon laquelle une victime de viol doive en prendre pour perpétuité, et me salit publiquement à cet effet, prenant en otage des enfants de 8 et 10 ans mêlés à cet inqualifiable débat. Le déshonneur (le sien) est sans limite.
Je précise que plusieurs attestations de professionnels de santé établissent sans une once d’ambiguïté que je n’ai aucune « instabilité psychologique ». Aucun incident n’est à déplorer s’agissant de la gestion de mes enfants.
Au delà de mon cas personnel, je m’inquiète plus largement du discours que le père tiendra à sa fille, âgée de 8 ans aujourd’hui, élevée la moitié du temps chez lui. Si elle devait être victime d’une agression, quelle qu’en soit à nature, au cours de son enfance ou adolescence, son père lui enseignerait-il qu’elle ne peut plus avoir ou élever d’enfant, car inapte à cet emploi ?
La violence de cette démarche abjecte, qui vise aussi à remémorer à une femme victime de viol de douloureux souvenirs afin de pression, mérite ici toute notre attention.
Un nouveau bourreau se substitue à l’ancien. L’agressée demeure elle, invariablement viol(ent)ée.