L’envers et l’enfer du décor: j’étais très jeune, et en couple depuis deux ans. J’étais heureuse d’avoir intégré une nouvelle famille, pour quitter la mienne, où j’avais subi des violences physiques et psychologiques (mais non sexuelles) de mon père. Mon compagnon me parlait souvent de ses besoins sexuels. Il estimait avoir besoin d’en parler, et se servait de cet argument pour me convaincre de lui céder régulièrement. Je lui avais pourtant dit que je n’étais pas très amoureuse, mais je l’aimais d’une certaine manière, et je lui faisais plaisir. J’ai voulu me marier pour me séparer encore plus de ma famille.
Le jour du mariage, je me suis levée à 6 heures pour me préparer. Ma belle-mère et son esthéticienne en avaient décidé ainsi. Je n’avais pas protesté, bien que je ne sois pas du matin. La journée du mariage a été belle, même si tout le monde a souffert de la chaleur.
Quand nous nous sommes éclipsés et retrouvés dans la chambre, plus de 20 heures après m’être levée, je tombais de sommeil. Je lui ai dit clairement “non” à trois reprises. Je lui ai dit que je ne pouvais pas. Il ne m’écoutait pas. Il aurait pu attendre deux heures, que je dorme un peu. Cela aurait été romantique, pour une nuit de noces. Il n’a pas attendu. J’ai compris que je devais céder pour avoir le droit de dormir. Je l’ai traité mentalement d’égoïste, et j’ai pensé qu’il ne me respectait pas. C’était au début des années 1990. On ne parlait pas de consentement dans les médias, alors, même si une loi venait de passer à ce sujet.
Huit ans après, je l’ai quitté.
Tout récemment, 28 ans après, j’ai compris qu’il m’avait violée. Je le lui ai dit. Je l’ai dit à sa mère. Il m’a répondu qu’il m’avait toujours aimée avec douceur et respect. C’est faux. Il m’a violée. C’est arrivé d’autres fois. Sa mère a qualifié ma conduite d’indigne, et a décidé de ne plus communiquer avec moi, alors qu’elle avait toujours prétendu m’adopter comme sa fille. Ce n’est pas grave, j’ai la cinquantaine maintenant, Je suis mère d’une jeune fille, et je suis forte. Cependant, je dis la vérité : j’ai été violée par mon mari. Un viol conjugal est passible de 20 ans de prison. Il y a prescription, mais je dis la vérité. Je dis aux femmes et aux jeunes filles : battez-vous pour vous faire respecter. Nous sommes leurs égales, et de la même espèce qu’eux. Je vous dis: éduquez vos garçons et protégez vos filles. L’avenir est devant nous : courage et croyez en vous ! Une femme a autant de valeur qu’un homme.
Chère anonyme, vous avez raison sur tous les points et en temps qu’homme j’ajouterai que l’homme se doit de réfréner ses élans en toute circonstance lorsque la femme dit non. En outre le désir de la femme prime toujours. Tout manquement constitue un acte de prédation et donc une inhumanité, une rupture dans notre commune humanité.
Vous avez été violée c’est parfaitement exact sur plan légal, cet homme était un violeur qui avilissait votre humanité. Heureusement que vous avez trouvé la force rompre.
Vous soulevez le point crucial sur l’éducation des garçons, il faut être intraitable sur ce point et leur inculquer le respect des filles et l’importance du consentement dans l’expérience humaine de l’intime. Le problème est que des forces sombres qui ne doivent rien au hasard s’y opposent, celles qui réinstaurent l’esclavage sexuel à travers le porno et la prostitution. C’est la raison pour laquelle il faut lutter comme vous l’écrivez justement, ce qui suppose de lutter contre les archaïsmes que nous croyons un temps disparus mais qui reviennent sous l’influence du porno et d’autres forces sociales. Tout ce qui améliore l’égalité entre femmes et hommes est un conquis pour tous et la clef du succès dans la transition climatique.
Je vous remercie pour votre témoignage et votre message d’espoir et d’humanité.
Affection, courage et soutien.