Bonjour. Je suis Surveillante Pénitentiaire. Depuis bien des années maintenant. J’aime mon travail. J’ai toujours été investie, ponctuelle, loyale, respectueuse. Au fil du temps, j’ai réalisé que j’étais plus considérée par la détention que par mes propres collègues. Certains d’entre eux ont décidé qu’ils pouvaient tout se permettre avec moi. Ça fait des mois que ça dure : insultes, menaces, humiliations, chantage, intimidations, devalorisation et décrédibilisation devant les détenus, degradation de mes conditions de travail, et par effet domino de ma vie personnelle. On m’a demandé de vouvoyer la hiérarchie car je suis un personnel féminin, quand d’autres Agents tutoient et copinent. On m’a demandé d’être moins enjouée et plus discrète dans l’exercice de mes fonctions, car je riais trop fort. Quand j’ai, après quelques semaines, finit par faire remarquer à un collègue trop pressant qu’il devait cesser ses agissements et me laisser tranquille, ils sont devenus ignorants et haineux. Solidarité masculine. Je n’en pouvais plus des dessins de sexes sur les ordinateurs avec poyf légende « j’aime le kiki », des massages de cuir chevelu, épaules et nuque, qui me dégoûtaient, sa peau sentait tellement fort le tabac. Des remarques sur mes tenues civiles « c’est transparent ce que tu portes, fait pas l’ignorance et la gênée, si tu portes ça c’est que tu cherches à ce qu’on te regarde ». J’ai essayé d’alerter la Direction, les acteurs sociaux, les syndicats… j’ai frappé à toutes les portes. Aucun collègue ne m’est venu en aide. Tout le monde sait, mais tout le monde se tait. Ce qui se passe dedans doit rester dedans. Derrière les murs. Et certains business doivent rester secrets, personne ne doit venir troubler le bon déroulement des petites affaires de certains pourris. Aujourd’hui je me sens seule et isolée. Si tu es Surveillante Pénitentiaire et que tu me lis, tu n’es pas seule, partageons nos histoires et brisons la loi du silence. Le harcèlement physique et moral, l’acharnement, n’est pas uniquement l’enfer quotidien des détenus. Je suis encadrée par des femmes, qui peut-être ont connu ce genre de souffrance, mais dont les déroulés de carrière priment sur le respect et le bien-être de leurs homologues. Le rouleau compresseur de la puissance politico-financière broiera tout sur son passage. Justice toi. Juste hisse toi. Faisons entendre nos paroles et retrouverons la sérénité derrière nos barreaux.
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