On était couchés l’un à côté de l’autre dans son lit, il faisait noir et on avait tous les deux chaud. Nous avions tenté de dormir dans les bras l’un de l’autre, mais tout simplement il faisait trop chaud. Nous nous étions séparés donc, lui en caleçon, moi en slip débardeur, sous sa couette. J’avais les yeux fermés, tentant de m’endormir.
Au bout d’un moment, je sentais son souffle chaud sur mon dos, mon épaule. Sa main cherchait son chemin sous mon débardeur, pour trouver enfin mon sein. Il commençait à me toucher et à se coller à moi, me caressant le corps, encore et encore. Mes tétons pointaient terriblement, je sentais toute la chaleur de son toucher se répandre dans mon corps et activer mécaniquement ma moiteur incroyable à ce moment-là. Ses mains descendaient de plus en plus vers ma culotte, touchant mes seins, mon ventre, mes cuisses, mes fesses, s’approchant de plus en plus de l’élastique de ma culotte.
C’est seulement lorsque je le sentais tout dur sur mes fesses que je réalisais ce qu’il se passait. J’étais paralysée, je ne savais pas quoi faire.
Après tout, ce n’était pas la première fois que ça arrivait, je ne connaissais de lui que ça, qu’il me touche comme ça, qu’il me prenne la main pour que je le touche comme ça, qu’il m’embrasse, me lèche, me morde. Pourtant, nos parents n’avaient jamais rien remarqué, ou alors ils ne nous l’avaient pas dit, pensant que c’était normal à notre âge.
Sauf que, ça faisait longtemps que ça durait, beaucoup plus longtemps que l’on puisse s’imaginer. Au début, on jouait à Papa Maman on disait. Ensuite, on était juste différents des autres, plus avancés, plus matures. On ne comprend pas bien ce que c’est encore la maturité à douze ans, enfin c’est ce que je crois. Ni à huit ans d’ailleurs.
Je ne sais plus quand cela a commencé, je ne me souviens que de ça avec lui. A chaque fois qu’on venait les voir, nos parents discutaient et nous les enfants on « jouait » dans sa chambre, dehors, partout.
Tout ça me traversait l’esprit alors qu’il s’apprêtait à écarter ma culotte pour s’introduire en moi.
Non.
Je ne veux pas.
Plus jamais.
Ça n’aura pas été la dernière fois pourtant.
Je lui ai dit non, il s’est légèrement écarté de moi, mais a continué à me toucher. Lorsqu’il a enfin remarqué que je ne réagirais pas, il s’est tourné de son côté, tout en me décrivant clairement ce qu’il se faisait.
J’ai tout entendu, tout subi, comme à chaque fois. Pourquoi je suis comme ça, pourquoi je ne peux pas réagir contre lui, contre ses attaques ? Pourtant je sais me défendre, je sais me battre, mais je crois qu’il me fait peur. Une fois il m’a menacée avec un couteau, l’autre fois avec son chien. Qui force quelqu’un à faire des choses à l’aide d’un chien ? Eh bien lui parce que moi je crains son chien, et il le sait. Il sait que j’ai peur de lui, il sait que je ne dirais rien, que je ne ferais rien contre lui.
Il finit enfin à côté de moi, me disant que la prochaine fois ce sera mon tour, que je ne pourrais plus l’éviter encore une fois.
J’ai pensé à tellement de possibilités pour me sortir de cette situation, je ne voulais rien dire à mes parents, rien dire à personne, mais s’il allait me toucher, je comptais me battre. Me battre pour que j’aie enfin des preuves, montrer au monde qu’il me fait peur et qu’il m’a cassé la gueule parce que je ne voulais pas de lui en moi, que je ne voulais pas de ses mains sur mon corps, que je ne voulais pas ses morsures sur mon corps. Je l’aurais laissé me marquer, pour que le monde reconnaisse ses crimes. Seulement, je ne savais pas si j’en sortirais vivante. J’avais tellement peur. Je voulais en parler à mes parents, au lycée, au monde entier pour m’éviter ça.
Une semaine avant d’aller le voir, ma mamie m’invitait au cinéma avec ma cousine, ce jour-là. Elle m’a sauvée. Je le sais. Je n’aurais pas survécu sinon, je me serais battue pour éviter à une autre fille qu’il lui arrive la même chose avec lui.
Je ne l’ai quasiment pas revu depuis, il a eu beaucoup de problèmes dans sa vie à partir de ce moment, et puis surtout il a eu une copine. Il m’a laissé tranquille après qu’il a eu un nouveau jouet. Je me dégoûte. Il lui fait peut-être la même chose, et j’aurais pu l’aider.
J’ai des problèmes. Je fais des crises d’angoisse, je fais que très rarement confiance aux autres, je ne m’ouvre pas, je suis parano, j’aime être seule. Tous les jours je porte un masque de normalité, de « tout va bien ». Je ne veux inquiéter personne, mais à l’intérieur je crie, je crie depuis des années, depuis mon enfance déjà. Aujourd’hui j’ai dix-neuf ans, et pendant un moment il m’a même fait perdre l’appétit, alors que j’aime la nourriture, j’aime cuisiner, et maintenant manger me dégoûte trop souvent. Je me rends peu à peu compte des conséquences de ses actes. Ça fait longtemps qu’on ne s’est pas vus, je ne peux plus rien faire contre lui, ça fait trop longtemps. Mais c’est que maintenant que je m’en rends compte, ce qu’il m’a fait est horrible.
Je pensais que c’était ma faute, que je le voulais, que j’étais plus mature et que quelque chose ne fonctionnait pas comme chez les autres chez moi pour que ça m’arrive. Et bien non. Il a abusé de moi pendant des années et je viens de le réaliser. C’est dur la réalité, surtout quand rien ne va dans ma vie, quand je dois être là pour les autres, ne rien montrer, toujours sourire, être en forme, être prête pour accueillir les émotions des autres.
Essayez voir d’apprendre un cours quand la seule chose à laquelle vous pouvez penser c’est que vous vous dégoûtez, que vous êtes une personne horrible, moche, seule. Essayez de faire quoi que ce soit où il faut vous concentrer et où vous avez des flashs de ce qu’il s’est passé, où vous essayez de savoir ce qui est vrai et qu’est-ce que vous vous êtes imaginé.
Essayez de vivre après avoir été détruit pendant des années, essayez de garder la face devant le monde, quand plus rien ne va dans votre tête.
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