Féministe et pourtant dans le déni
C’était l’année dernière. C’était mon tout premier copain, mon premier amour, mes premières expériences sexuelles. J’avais 18 ans.
Tout se passait bien, en tout cas du côté de nos relations sexuelles. Il était plutôt prévenant, on se découvrait au même rythme, même si j’avais tendance à être plus réservée, moins à l’aise avec mon corps et moins entreprenante, de peur de passer pour “une fille trop facile”. Et pourtant, je me considérais déjà comme féministe, mon militantisme s’arrêtant certes à ouvrir ma bouche dans un milieu plutôt rural où ces idées ne paraissaient pas être une priorité, mais c’était tout ce que je pouvais faire.
Sauf qu’une nuit, Victor ne m’a pas demandé mon avis. Alors que je dormais, il se chauffait. Mon sommeil était aussi lourd que ce poids que j’ai l’impression de porter seule depuis que j’ai conscientisé m’être faite violée. N’arrivant pas à ouvrir les yeux, ne répondant pas à ses baisers, il continua et me pénétra.
J’ai conscience que je n’ai pas vécu le viol le plus traumatisant qui existe, car je l’ai réalisé tard, 6 mois après avoir rompu, que je n’ai pas été droguée, que je n’ai pas subit de contraintes physiques, etc. En revanche, j’ai aussi conscience que sur mes dix amies les plus proches, la moitié ont déjà subit un viol, perpétré par un compagnon, bref, une relation à la base, consentie.
J’aimerais et j’ai espoir que ça change.
Mais paradoxalement, je ne compte pas porter plainte, parce que je n’ai pas envie de le revoir, de ressasser. La seule certitude que j’ai, c’est que j’ai besoin de me faire aider.