C’est en lisant des témoignages que je me rends compte du niveau d’intériorisation culturelle de la domination masculine. Si je regarde dans le rétro, si je fouille dans ma mémoire (sans trop d’efforts), je retrouve de multiples situations qui relèvent de cette domination, avec plus ou moins de violences physiques… Cela a commencé par un animateur de colo aux mains baladeuses (j’ai 12 ans). Un mec qui nous poursuit sur 10 km (nous avons 15 ans avec ma pote). Un autre qui me menace de viol après mon refus de coucher avec lui, je me souviens de la peur, de ses mains qui ne me lâchent pas, de son assurance dans la force (j’ai 16 ans). Un mec qui se masturbe dans la rue en me regardant le nez collé à la fenêtre de mon appart (j’ai 21 ans). La même scène à la fac au fond de l’amphi (j’ai 22 ans). Il y a quelques années un attouchement dans le métro bondé, un baiser forcé, et régulièrement il y a aussi quelques années des insultes lorsque je m’affichais avec ma copine. Il aura fallu que je remette tout ça bout à bout pour admettre que j’ai moi aussi, comme tant d’autres subi des violences. Je n’étais pas convaincue au départ par la démarche mais force est de constater que la libération de la parole dépasse ce que chacun aurait pu imaginer. un sujet politique est en train d’envahir le débat public.
Oui je trouve votre récit très bien résumé en tout état de cause, je m’y retrouve du haut des mes 52 ans…
Il y a eu aussi ce banquier BNP qui me “proposait d’aider” mes pauvres parents artisans du BTP , moyennant… “mon consentement” (terme repris plusieurs fois avec netteté), celui qui nous aurait permis de “faire de beaux enfants tous les deux” si “je voulais être gentille et penser à mes parents”. Ce pauvre type qui, après s’être vu opposé un refus méprisant (dans lequel je l’ai bien remis à sa place), a immédiatement (après une grosse colère toutefois) et conformément à sa “promesse”, dès le lendemain matin, mis mes parents sur la paille. Cela fut le début de la fin pour eux, qui ont dû mettre la clé sous la porte, déménager et vivre… de rien.
Il y a aussi les nombreux collègues au travail, surtout lorsque l’on est la seule femme sur un chantier… Lorsqu’un nouveau sous-chef arrive et t’annonce la couleur lors de la 1ère entrevue ; “vous savez ce qu’on dit ? Une femme qui couche est une pute… et sinon c’est une salope” et bien sûr c’est, dans le milieu considéré comme drôle, et si on ne rit pas, c’est qu’on est… une connasse. Donc, méritant une sale réputation et finalement puisque mal vue.. poussée (largement et patiemment) vers la sortie.
Il y a le sale vieux con, moche, visqueux et naze qui passe et repasse devant toi dans la rue en remuant ostensiblement des “sous” dans sa poche pour que tu entendes le cliquetis, alors que du haut de tes 20 ans tu attends ta copine à la sortie du métro, puis te dis “je pourrais payer si tu veux…”
Il y a l’autre, qui dans une ruelle noire et déserte, entre son costume cravate et son porte-document, fait brutalement demi-tour pour se jeter sur toi, te pousser face contre mur, relever ta jupe et te tripoter.
Il y a le chauffeur de taxi à 2h du matin qui te balade dans sa voiture, tu ne sais pas où il t’emmène pendant qu’il débite un tas de pourritures qui n’ont rien à voir avec toi, tu es juste une jeune cliente, puis qui commence à s’énerver, à taper sur le siège, à t’insulter… Il a bien fallu un ange-gardien surpuissant ce soir-là.
Il y a bien pire, ce qu’exprime de façon unilatérale ce site :
Que le dernier des derniers trouve toujours soutien et raison quand il s’agit d’humilier une femme, la rabaisser.
Qu’il est imposé comme une vérité générale que celle qui refuse doit mériter les pires châtiments, que celle qui accepte… aussi, que son seul salut est dans l’aptitude à plaire au premier porc qui passe…
Non, il y a encore pire : les autres femmes, celles qui trouvent que “tu exagères”, que “tu es trop sensible”, “trop exigeante”…
Enfin, ça, c’était avant…